Coronavirus, crise et résilience sociétale

18/03/2020 - 7 min. de lecture

Coronavirus, crise et résilience sociétale - Cercle K2

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Depuis le 17 mars midi, notre pays est en confinement. Cette décision gouvernementale, motivée par l’évolution d’une épidémie qui touche tout le territoire avec des focales dans le Grand Est et la région parisienne (Paris et l’Oise essentiellement), a de quoi nous interloquer après des semaines de gestion d’une crise selon un mode que certains ont qualifié de « brouillon », « à la vue » sans réelle vision et projection de la part des autorités. Ce courant de pensée pourrait se résumer ainsi : « trop peu et trop tard ! »

Mais qu’en est-il réellement ? Sommes-nous réellement face à un événement systémique, un méga choc, un « Cygne noir » si imprévisible que cela ? Est-il possible d’appliquer de manière lisible les principes et outils du management des risques et des crises à cet épisode funeste ? Peut-on tenter de décrypter ces événements en les passant au crible des stratégies et des planifications qui, bien que n’étant pas explicites, demeurent perceptibles au travers des décisions prises et des plans existants ? Quel est l’impact des médias dans cette crise ? Quelle est la stratégie de communication mise en œuvre ?Voilà très rapidement les questions auxquelles je vais tenter de répondre dans les lignes qui suivent.
 

Sommes-nous réellement face à un événement systémique, un méga choc, un « Cygne noir » si imprévisible que cela ?

 
En 2007, Nicholas Taleb publiait son best-seller « Le Cygne noir : La puissance de l'imprévisible ». Opus dans lequel l’auteur développait le concept du « Cygne noir », c’est-à-dire l’occurrence d’un événement imprévisible aux conséquences dramatiques et funestes. Ainsi, il s’attachait à remarquer le rôle disproportionné d’événements majeurs rares et extrêmement durs à prédire, l’impossibilité de calculer la probabilité de ces événements rares, les biais cognitifs qui rendent aveugles individuellement et collectivement.

De fait, les trois caractéristiques du « Cygne noir » s’appliquent parfaitement à la crise actuelle :

  • surprise ;
  • conséquences majeures ;
  • rationalité a posteriori, car les informations peuvent être disponibles mais non utilisées de manière prédictive.

Cependant, par-delà ce constat, peut-on considérer cette épidémie comme réellement imprévisible ?

Pour répondre à cette question, je vous propose d’utiliser un des outils majeurs du management des risques : la matrice de criticité.

La matrice de criticité permet de classer les risques menaçant une organisation, quelle qu’elle soit, en termes d’impacts et de probabilité.

En nous référant à la typologie du coronavirus, nous pouvons remarquer que ce type de virus a déjà sévi au cours des 20 années précédentes

La probabilité peut être étalonnée en fonction de l’historicité de la survenance d’un risque identifié.

L’impact est, lui, mesuré en fonction de ces effets sur les cibles susceptibles d’être menacées par le développement du risque.

Nous pouvons alors remarquer que les coronavirus qui vont du rhume à une infection pulmonaire sévère, responsable d’une détresse respiratoire aiguë, ont déjà entraîné quatre épidémies graves chez l’Homme : le SRAS, responsable d’une épidémie en novembre 2002 et juillet 2003, le Mers-CoV, identifié en 2012 au Moyen-Orient et celle du COVID-19 en 2020.

Parallèlement, nous pouvons également considérer les impacts sur les dimensions sanitaire, sociétale, économique, médiatique de la société française.

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La matrice nous indique donc qu’une épidémie avec un virus coronarien est susceptible de se reproduire tous les cinq ans. L’évaluation de la criticité va de 12 à 15.

Est-il possible d’appliquer de manière lisible les principes et outils du management des risques et des crises à cet épisode funeste ?

Comme nous l’avons vu précédemment, la matrice de criticité s’applique tout à fait à la situation actuelle.

Il en va de même des autres principes du management des risques comme l’inévitable système source-cible schématisé ci-dessous.

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Les concepts de prévention, prévision, protection, résilience (continuité d’activité) s’avèrent alors pertinents de facto.

Ces concepts ont pour objet :

  • Prévention : éviter à la source d’émettre vers la cible identifiée ;
  • Prévision : mettre en place des plans opérationnels en vue de palier l’éventuel échec des mesures de prévention ;
  • Protection : éviter que les émissions de la source touchent directement la cible ;
  • Résilience : déployer des mesures planifiées en vue d’assurer la continuité des activités considérées comme essentielles.
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À partir de cette étape, il est alors recommandé de classer par ordre de gravité décroissant les scénarios de crise plausibles. Ces scénarios ont tous des conséquences communicationnelles plus ou moins accentuées.

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 La crise se déploie sur des terrains qu’il convient d’identifier afin de la contrer.

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À ce stade de la réflexion, il importe de modéliser deux scénarios ayant pour but de permettre d’envisager les évolutions possibles de la situation. Ces scénarios constituent une aide à la décision.

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Le scénario majeur, c’est-à-dire celui susceptible de nuire gravement à l’activité, aux intérêts centraux de l’organisation, voire à la survie de celle-ci exige une étude, une planification « à froid » en amont.

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Pour achever le processus visant à choisir et valider une stratégie opérationnelle et de communication, l’utilisation d’une matrice SWOT demeure indispensable. Cette matrice a pour objet de mettre en exergue les forces, les faiblesses, les menaces ainsi que les opportunités, recommandations, actions susceptibles de palier les vulnérabilités identifiées.

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Peut-on tenter de décrypter ces événements en les passant au crible des stratégies et des planifications qui, bien que n’étant pas explicites, demeurent perceptibles au travers des décisions prises et des plans existants ?

Depuis le début de cette crise, la stratégie du gouvernement s’est appuyée sur les divers plans existants en vue de faire face aux situations sanitaires exceptionnelles (SSE) ainsi que sur l’organisation de gestion de crise très structurée existant en France.

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Parallèlement, un conseil scientifique indépendant ainsi que l’agence Santé publique France assurent le suivi et l’évaluation quotidienne de la progression de l’épidémie.

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Cette stratégie, dont l’objectif initial était, très clairement, de tout mettre en œuvre pour assurer au maximum la continuité de la vie sociale et économique du pays, a basculé le 16 mars vers une stratégie de coup d’arrêt radical à la progression du virus afin de permettre de reprendre le plus rapidement possible une vie sociale et économique normale.

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Durant le pic de la crise, la pertinence des décisions prises et des actions mises en œuvre dépendent de deux paramètres essentiels :

  • la qualité du processus de prise de décision ;
  • la capacité du directeur de crise à orienter le travail collectif de la cellule de crise, arbitrer les options proposées, décider et assumer les actions conduites.

Les principes d’actions de la continuité d’activité sont donc appliqués à l’ensemble des organisations publiques et privées autour des fonctions considérées comme essentielles.

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Quel est l’impact des médias dans cette crise ?

Notre monde moderne connecté est propice à « l’infodémie ». De fait, l’omniprésence des réseaux sociaux, leur aptitude à l’alerte, mais également à la nuisance, conduit à une saturation du web en « infox » diverses anxiogènes. Parallèlement, les chaînes d’information en continu 24/7 du fait de leur modèle économique ont tendance à privilégier le sensationnel et l’émotionnel au détriment de l’explication et de la pédagogie.

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Ces vecteurs d’information essentiels jouent donc un rôle dual et ambiguë. Dans la plupart des cas en situation de crise, ils participent à l’installation d’un climat de psychose et de peur allant à l’encontre des objectifs poursuivis par les gestionnaires de la crise. C’est malheureusement ce que l’on peut observer à l’occasion de la crise du COVID-19.

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Quelle est la stratégie de communication mise en œuvre ?

Assurer la cohérence entre le ressenti de l’événement, les enjeux, les objectifs opérationnels, les messages diffusés, demeure une sorte de summum permanent de la COM de crise.

L’omniprésence des réseaux sociaux, leur aptitude à l’alerte, mais également à la nuisance, doit conduire au déploiement d’un système efficace de veille de ces différents canaux. En interne, le suivi des indicateurs et des informations opérationnelles critiques complète utilement ce premier dispositif. Enfin, le climat social, les RPS (risques psychosociaux), constituent également des paramètres à ne pas négliger. En effet, scruter les signaux faibles permet de les interpréter et d’ainsi être en mesure de déployer un premier dispositif ad-hoc, en vue de faire face à des évolutions initialement masquées de la situation.

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Le porte-parole, conseillé par l’entité COM de la cellule de crise, appuie les actions mises en œuvre en ayant le souci constant de la cohérence avec les réalités du terrain. La COM de crise s’attache également à conserver un rythme propre à devancer, temporiser et accompagner les événements de toute nature. Il s’agit là de l’impératif de « tempo » dans la manœuvre de COM de crise.

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En COM de crise, l’essentiel réside dans la conservation de l’ascendant informationnel sur les autres acteurs médiatiques impliqués, qu’ils soient professionnels ou sociétaux.

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Toute situation de crise se caractérise par trois phases distinctes. La phase de sauvegarde est la plus cruciale et dimensionnante. C’est celle que nous vivons depuis début janvier avec le passage successif aux stades 1,2 et 3 du plan ORSAN REB.

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Les trois phases de la gestion de crise sont alors accompagnées par une manœuvre de COM de crise, articulée autour de trois objectifs concomitants.

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La mise en œuvre de cette manœuvre passe alors par l’identification des cibles prioritaires et des canaux à utiliser.

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18/03/2020

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