Sommes-nous en dictature et passons-nous outre nos règles de droit ?

19/07/2021 - 3 min. de lecture

Sommes-nous en dictature et passons-nous outre nos règles de droit ? - Cercle K2

Cercle K2 neither approves or disapproves of the opinions expressed in the articles. Their authors are exclusively responsible for their content.

René Picon-Dupré est ancien DRH, Consultant RH et management.

---

Que n’a-t-on pas entendu depuis que le Président de la République a annoncé la future obligation vaccinale pour les soignants et l’extension de l’utilisation du passe sanitaire face au développement du variant delta de la COVID 19 ?

Nous serions dans une dictature, avec des références scandaleuses à des périodes de l’histoire que je ne citerai pas, et un certain nombre de professionnels (responsables de bar et de restaurant notamment) seraient transformés en policiers sans en avoir les qualifications.

Qu’il me soit permis, dans ces quelques lignes, de rappeler quelques vérités pour remettre, comme on dit, les pendules à l’heure.

 

1. sur la dictature

Vous connaissez beaucoup de dictatures où l’on vote librement, où l’on élit au suffrage universel le Président de la République, les députés, les maires, les conseillers départementaux et régionaux, où la presse peut critiquer ouvertement les décisions du Gouvernement et où le droit de manifester est garanti par le code pénal?

Certes on peut toujours considérer que le Président décide trop tout seul, mais en est-on si sûr ? et après tout, Clémenceau avait coutume de dire que pour décider il faut un nombre impair, sachant que trois est un chiffre trop important !

Et la France serait-elle prête à des référendums fréquents à l’instar de ce qui se passe en Suisse, y compris sur des sujets qui peuvent paraître secondaires : j’ai souvenir d’un dimanche où nos amis helvètes étaient appelés aux urnes pour savoir si les mosquées – en Suisse – devaient ou non arborer un minaret…

 

2. sur la soi-disant privation de liberté

Le passe sanitaire (et non le passe vaccinal) est-il vraiment source de privation de liberté ?

Ceux qui n’en sont pas dotés ne pourront accéder à certains lieux ; crée-t-on pour autant une France à 2 vitesses, en privant de liberté ceux qui ne veulent pas se faire vacciner ou ne peuvent présenter une preuve de non contamination ?

D’abord, à chacun son choix, avec les conséquences qui y sont attachées, et cela-même relève de la liberté individuelle, même si on peut regretter que le souci du collectif soit parfois oublié en faveur d’un égoïsme qualifié de liberté.

Par ailleurs, je souhaite rappeler que les contraintes sanitaires existent déjà :

  • un certain nombre de vaccins sont obligatoires pour les jeunes enfants ;
  • les professionnels de santé doivent être vaccinés contre l’hépatite B ou pouvoir attester qu’ils sont immunisés ; la vaccination contre la COVID n’est donc pas une nouveauté ;
  • pour les voyages à l’étranger certains vaccins sont obligatoire (fièvre jaune pour certains pays d’Afrique) et il existe un carnet international de vaccination pour suivre sa situation vaccinale et pouvoir entrer dans certains pays : les grands voyageurs et les personnels des compagnies aériennes et maritimes le connaissent bien ; je suis très surpris qu’on n’en ait quasiment pas parlé.
     

Il existe également des contraintes d’une autre nature qui n’ont jamais été qualifiées de dictature :

  • pour conduire une voiture, il faut un permis de conduire ; libre à chacun de ne pas le passer, mais il se prive de la liberté de circuler au volant d’une voiture !
  • il en va de même pour piloter un avion ou commander un bateau ;
  • certaines professions, dites réglementées, exigent un diplôme d’État, à commencer par les professions médicales ; à ce propos, il est d’autant plus surprenant de voir certains membres de ces professions crier au scandale devant l’obligation de vaccin, alors qu’ils ne peuvent exercer leur métier qu’en justifiant de formations et de diplômes bien identifiés ;
  • d’autres métiers, en raison des risques ou des contraintes, exigent une habilitation particulière (travail sous tension pour les intervenants sur lignes électriques) ou surveillance médicale particulière (par exemple grutiers).
     

A l’extrême limite, le fait qu’il faille présenter un titre de transport valide pour prendre un train ou un métro ou un billet pour accéder à un musée est-il une limitation à notre liberté ?

 

3. sur le fait de confier à des non policiers des activités de contrôle

Rien de nouveau là aussi.

Nos cafetiers et restaurateurs qui refuseraient de vérifier les passes sanitaires se rappellent-ils qu’ils ont déjà la responsabilité (et c’est affiché dans tous leurs établissements !) de lutter contre l’ivresse publique et de ne pas servir d’alcool aux mineurs ? De même les buralistes par rapport à la vente de tabac et de jeux d’argent à ces mêmes mineurs.

Quand on loue une voiture, le loueur vous demande de présenter votre permis de conduire et personne ne trouve cela exagéré !

Pour s’inscrire dans un club de sport sérieux, on peut vous demander de produire un certificat médial attestant que l’on ne souffre pas de pathologie incompatible avec l’activité envisagée.

On pourrait trouver encore d’autres exemples du même genre où les professionnels qui exercent un contrôle ne font pas pour autant un travail de policier.

Et surtout ne confondons pas le fait de contrôler l’application d’une règle et le fait de sanctionner, qui lui, relève d’un pouvoir de police.

René Picon-Dupré

19/07/2021

Last publications