Le Cercle K2 n'entend donner ni approbation ni improbation aux opinions émises dans les publications (écrites et vidéos) qui restent propres à leur auteur.
Marc Carré est Consultant indépendant en sécurité d'entreprise et intelligence économique & Professeur à l'École d'ingénieurs EPF.
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Peut-on parler de bonheur dans un monde en ébullition en raison des guerres armées, économiques et informationnelles auxquelles s’ajoutent le chômage, le Covid et les crises sociales ! De plus, la remise en question des valeurs, mais aussi de l’histoire de notre pays où l’on se permet non plus de constater mais de juger, et où l’autorité s’émiette dans tous les domaines. Que pouvons-nous espérer ? En cette période où l’Homme a soif d’une jeunesse éternelle et veut décider de son genre, et où le robot et l’intelligence artificielle sont au seuil de nous remplacer, que devenons-nous ? Enfin, où l’argent et non plus l’Humain constitue la préoccupation majeure de notre société !
En tant qu’homme "ordinaire", ni philosophe, ni écrivain, je vais essayer de vous donner simplement ma perception qui n’a pas la prétention de représenter la vérité, car le bonheur est complexe et chacun tente de le définir, à sa manière, et de le chercher, selon sa méthode.
Esquissons quelques constats préliminaires :
- Notre société occidentale ne joue-t-elle pas un rôle dans notre conception du bonheur et produit-elle vraiment le bonheur ?
- Est-il toujours possible d’être soi-même et de s’en affranchir ?
- Pour se sentir heureux, faut il vivre dans le bonheur ?
- Ce bonheur correspond-il à une réalité ou à une aspiration ?
Méditons sur 2 citations :
- "Tout homme veut être heureux ; mais pour parvenir à l'être, il faudrait commencer par savoir ce que c'est que le bonheur", Jean-Jacques Rousseau.
- "Il y a deux sortes de gens : ceux qui peuvent être heureux et ne le sont pas, et ceux qui cherchent le bonheur sans le trouver", proverbe arabe.
Essayons de cheminer, sur une route chaotique, vers une cible qui est comme l’horizon, c’est-à-dire une ligne qui recule toujours quand on avance… et qu’on croit l’atteindre.
Après un questionnement sur le bonheur, nous édicterons quelques règles simples, voire élémentaires, pouvant nous rendre heureux sur cet itinéraire parsemé de bonheurs…
Questionnement sur le bonheur
Arrêtons de courir après le bonheur, il sait où nous trouver. On dit souvent que le bonheur se trouve dans les choses simples, alors recherchons les voies faciles ! Cessons de regarder ce qui nous déprime, pour nous tourner vers ce qui peut nous rendre heureux ! En effet, même si ce sentiment est subjectif, il y aurait certains facteurs qui favorisent cet état d'épanouissement.
La génétique et les facteurs culturels jouent un grand rôle dans notre bien-être et notre humeur. En l’occurrence, 50 % de notre plénitude serait liée à nos gènes. Les personnes qui ont baigné dans l’amour pendant l’enfance sont également plus susceptibles d’avoir un "cerveau heureux". Chaque individu serait responsable de près de 40 % de son sentiment de bonheur, d’après les recherches menées par la Dr Sonja Lyubomirsky qui passe elle-même sa vie à étudier les "cerveaux heureux". Les 10 % restants seraient liés à nos conditions de vie : lieu d’habitation, argent à disposition, état matrimonial, apparence, santé, etc. "Les activités de bonheur ne surprendront personne", a déclaré la Dr Lyubomirsky. "Ce sont des choses qui passent par la gratitude, le pardon, les relations, le fait de savourer le moment présent, de faire de la méditation", ajoute la spécialiste qui ne prétend pas donner une liste exhaustive des moyens à mettre en œuvre pour être heureux.
Les recherches du Dr Richard Davidson viennent confirmer celles de la scientifique. En étudiant les cerveaux de moines bouddhistes, des hommes qui passent leur vie à se forcer à ressentir des émotions positives, le médecin a constaté que leur bonheur était "hors norme". Ce dernier en conclut que notre cerveau "n'attend que d'être transformé" et que nous pouvons tous "prendre nos responsabilités pour le changer de manière plus positive".
Nous souhaitons toujours plus, nous espérons mieux, nous rêvons d’autre chose, nous avons peur de perdre ce que nous possédons, nous anticipons l’échec… C’est ainsi que nous pouvons nous sentir angoissés ou insatisfaits alors même que nous avons tout pour être heureux. Et le rappel à la raison n’y change rien ("j’ai de la chance, je devrais arrêter de me plaindre", etc.). Or, cette insatisfaction permanente n’est pas mauvaise en soi car c’est elle qui nous pousse à agir, à nous battre, à avancer dans la vie : elle est notre moteur.
Sur le plan génétique, nous sommes programmés pour être insatisfaits. Des millénaires de survie nous ont appris à ne jamais nous arrêter à ce que nous avons, à ne jamais nous satisfaire de nos acquis. Nous convoitons, nous envions, nous anticipons, nous appréhendons…, ce qui génère du stress, un certain trouble intérieur, mais aussi des rapports conflictuels avec les autres.
Cette insatisfaction se change en souffrance lorsque nous avons l’impression de stagner, de ne pas être à la hauteur, de ne pas atteindre nos objectifs ou d’être victime des autres… Le sentiment d’échec apparaît alors, fermant définitivement le chemin du bonheur.
Ainsi, le bouddhisme éclaire les causes de la souffrance : c’est parce que nous nous attachons à des choses vides, vaines et éphémères que nous souffrons. Ainsi, le fait de vouloir, d’exiger, de désirer, de convoiter, d’espérer, de jalouser… aboutit à la souffrance. Et c’est donc par le lâcher-prise, l’acceptation et le renoncement à une partie de nous-même que nous pourrons "aller mieux".
Le Bonheur, par définition, est un état de satisfaction durable et stable. La société nous impose des normes souvent difficiles à atteindre et parfois contraires à nos idées et, par la même, influent sur notre façon d’aborder l’existence. Le bonheur est un état durable de plénitude et de satisfaction, état agréable et équilibré de l’esprit et du corps, d’où la souffrance, le stress, l’inquiétude et le trouble sont absents.
Une autre réflexion, c’est se demander quelles sont les sources de vitamines psychologiques dans notre vie : qu’est-ce qui me permet d’être parfaitement moi-même ? Qu’est-ce qui me permet d’être efficace ? Et, enfin, qu’est-ce qui me permet d’être connecté aux autres ?
Si une boussole interne nous guide naturellement vers ces vitamines, que ce soit au travail ou dans notre vie personnelle, cela risque d’augmenter nos niveaux de bonheur à court et long termes.
Comprendre cela, c’est déjà avancer sur le chemin du bonheur...
Mais alors quelle est la "Recette du bonheur" ?
Se poser la question : est-ce que je suis satisfait de ma vie ? Trouver une raison d’être, une façon de vivre sa vie. Qu’est-ce que je veux dire de moi à la fin de ma vie ?
Sommes-nous heureux :
- À un retour de vacances, quand nous retrouvons, avec bonheur, nos clés au fond de la valise alors que nous piaffions depuis 15 minutes devant une porte qui demeurait inexorablement fermée ?
- Quand nous voyons, avec bonheur, des visages apaisants et souriants de personnes qui souffrent dans leur corps ?
- Quand nous entendons, avec bonheur, notre médecin nous communiquer des résultats médicaux rassurants ?
Ce qu’il faut éviter, c’est rechercher le bonheur par pression sociale, par matérialisme, par capitalisme. Ce serait alors une course sans fin qui ne nous apporterait pas ce que nous poursuivons. Il faut avoir une quête saine, soit par plaisir, soit par sens, soit par valeur personnelle. Ainsi, la destination et le chemin nous emmèneront vers ce que nous recherchons.
On remarque qu’il y a parfois un lien très fort entre l’argent et le bonheur lorsqu’on s’extrait de la pauvreté mais, très vite, on atteint un niveau de satiété et lorsqu’on a dépensé ce niveau de satiété, le bonheur diminue.
Pourtant, comprendre cela, c’est déjà avancer sur le chemin du bonheur. Puisqu’il est possible d’agir sur notre bonheur, découvrez quels sont les petits changements dans notre quotidien susceptibles de faire une grosse différence sur votre humeur.
Alors pour essayer d’être plus heureux, énonçons des axes élémentaires :
- Ne plus se plaindre. À quoi cela sert-il de se plaindre, d’exposer sans cesse ses soucis ? Cela n’apporte rien. D’ailleurs, souvent, notre entourage reste indifférent à nos difficultés ou, parfois, il se réjouirait presque de nos problèmes. Une personne qui se plaint toujours est-elle rassurante ? Soyons constructifs !
- Ne plus courir. Pourquoi vouloir avancer toujours plus vite ? "Que gagne-t-on sur une route sinueuse de montagne en prenant des risques pour aller vite car, souvent, toutes les voitures se regroupent pour traverser un carrefour ou un village". Ne confondons pas vitesse et précipitation !
- Savoir analyser pour choisir. Il faut sélectionner ce dont nous avons besoin face aux offres présentes devant nous pour ne pas être victime d’une boulimie suicidaire. Ce monde de grande consommation veut nous imposer un style de vie non adaptée. "Le trajet le plus rapide est-il toujours le chemin le plus court ?". "Une éponge ne permet d’absorber que l’eau qu’elle peut retenir dans ses alvéoles". Restons maîtres de nos choix de vie, en particulier, en hiérarchisant nos priorités !
- Ne plus être victime de la spirale du toujours plus "argent". Pourquoi vouloir gagner toujours plus d’argent ? Thésauriser, c’est bien, mais l’argent qui dort sert à quoi ? L’argent permet de vivre mieux quand on a le temps d’en profiter et, souvent, on s’aperçoit que de petites choses bon marché occasionnent autant de bonheurs que des choses onéreuses qui ne correspondent pas à nos aspirations réelles. Ouvrons les yeux sur les bienfaits de l’argent !
- Rechercher les personnes positives. Une personne pessimiste émet des ondes négatives, voire toxiques. Pour un pessimiste, tout semble insurmontable et aucune action ne peut mener vers une zone ensoleillée, donc de bonheur, alors que l’optimiste voit des occasions intéressantes dans chaque difficulté qu’il éprouve car il sait transformer le verre à moitié vide en un verre à moitié plein. Fuyons les pessimistes et soyons positifs !
- Savoir rester soi meme. "Les conseilleurs ne sont pas les payeurs !". Pouvoir dire NON permet d’être reconnu et de ne plus être considéré comme un suiveur, assimilable souvent à un ectoplasme ! Nous devons forger, façonner notre personnalité avec nos traits de caractère qui nous autoriseront de vivre dans ce troupeau de moutons de Panurge. Essayons d’exister sans vouloir éblouir !
- Apprendre à décrypter les personnalités. Il faut être ce qu’on est et voir les autres tels qu’on les perçoit. La perfection est un mythe et vouloir l’atteindre est une erreur. Nul n’est parfait et, dans tout individu, il y a du bon qu’il faut rechercher avec patience et discernement. "Dans un ciel nuageux ou orageux, il faut savoir attendre pour trouver le coin de ciel bleu qui redonnera le moral". Dépoussiérons ce que nous sommes et ce que nous regardons.
- Montrer la joie de vivre. La tristesse attire souvent la tristesse car la compassion est en filigrane et c’est ce qu’attendent beaucoup d’individus qui aiment se plaindre ou se faire plaindre. La force apaisante du sourire, l’accueil favorable au travers d’un comportement ouvert, la compréhension rassurante avec des mots lisibles sont des vecteurs d’une joie intérieure. Soyons heureux dans notre être et notre paraître.
- Mener une vie équilibrée. La règle des 3 points d’appui, impérative en alpinisme pour progresser sur les parois délicates, est applicable dans la vie. Un savant dosage équilibré entre la vie professionnelle, la vie personnelle et l’hygiène de vie est impératif mais le socle de cette vie radieuse est de veiller avec attention à sa santé physique et mentale (alimentation, exercices physiques, relaxation, sociabilité, oxygénation). Ouvrons, avec intelligence, les yeux sur toutes les composantes de la vie.
- Apprendre à "perdre" du temps. Qui ne prend pas plaisir à regarder une mer agitée, un torrent qui s’écoule, des poissons nager dans un aquarium, ou encore contempler un paysage depuis le balcon d’une résidence de vacances ? Sommes-nous heureux de voir progresser nos jeunes collaborateurs suite aux nombreux conseils que nous avons pris le temps de distiller, au fil de l’eau ? Pensons à nous déconnecter du temps qui passe et laissons le temps au temps.
- Vouloir aimer. Nous aimons-nous ? Aimons-nous servir les grande causes ? Aimons-nous les gens heureux ? Il faut vouloir donner plus que recevoir et il faut avoir soif d’aimer. "Quand on n’a pas ce que l’on aime, il faut aimer ce que l’on a", Thomas Corneille.
En conclusion, que penser ?
En fait, c’est difficile de caractériser le bonheur car on a tendance à le définir par ce qu’il n’est pas, par ce qui le compose, l’améliore ou lui nuit, mais c’est difficile de s’arrêter à une définition qui explique bien ce sentiment tant recherché. Alors, qu’est-ce qu’être heureux et qu’est-ce que le bonheur ?
Mais pour se sentir heureux, est-il nécessaire de vivre sans souffrance et en l’absence de malheur ? Je crois que pour être heureux, nous devons savoir profiter des difficultés inéluctables pour les retourner en messages positifs afin qu’elles enrichissent notre quotidien.
Pour être heureux, nous devons y travailler quotidiennement de notre mieux, nous n’avons pas besoin de chercher le bonheur. Nous avons besoin d’agir aujourd’hui, chaque jour, pour créer les conditions gagnantes afin d’être heureux.
En intégrant les notions du temps, de la globalité et de la cinétique, nous pourrions dire que mon bonheur est un sentiment de satisfaction générale face à ma vie, à ma situation globale du moment et à la direction dans laquelle j’avance. Cette satisfaction globale et imparfaite est jumelée à un sentiment que la vie est généralement bonne, significative et utile pour moi.
Jean d’Ormesson disait : "un jour, je m’en irai, sans avoir tout dit". Pour ce grand écrivain et philosophe, "le Bonheur, il ne faut pas le chercher mais le savourer". En effet, savoir savourer des moments de convivialité, d’être privilégié par la vie, d’être en bonne santé.
"J'ai décidé d'être heureux parce que c'est bon pour la santé", Voltaire.
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17/04/2023