Covid-19 : sauvons le court terme et préparons le rebond
20/03/2020 - 5 min. de lecture
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Eric de Bettignies, Associé fondateur du cabinet Advancy
Diplômé de l'École des Mines de Paris, Eric de Bettignies intervient, depuis près de 25 ans, auprès des patrons du secteur de tourisme, du loisir et de l'industrie dans leurs stratégies en France, en Europe et à l'international.
Après 3 ans de missions spéciales pour le Groupe Lagardère et 6 ans de conseil en management, Corporate finance et stratégie (Arthur Andersen, Price Waterhouse, AT Kearney), il a fondé le Cabinet Advancy en 2000 (cabinet français, 150 consultants, 5 bureaux dans le monde).
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Le Coronavirus nous a pris au dépourvu, faisant irruption après un début d'année qui inaugurait une croissance de l’économie mondiale d’environ 2,9%. Ses effets se sont immédiatement répercutés sur l’activité globale des entreprises : cash et rentabilité. Pour éviter que la situation ne s’infecte, deux leviers d’action sont indispensables : organiser l’urgence présente tout en se préparant pour le moment où l’activité reprendra.
L’étau du Covid-19, virus d’abord lointain puis de plus en plus proche, s’est resserré jour après jour. C’est une crise mondiale qui nous met tous à l’épreuve. L’ampleur de l’épidémie, sa vitesse, l’abondance d’informations parfois contradictoires, le crescendo de dispositions prises par le gouvernement et à prendre individuellement, ainsi que toutes ses conséquences prévisibles et imprévisibles, rendent difficiles les prises de décision requises dans ce genre de contexte.
Le coronavirus, qui a présent nous confine à domicile, bouleverse nos vies quotidiennes, nos habitudes, nos façons de travailler, de penser et de réagir. Nous ne savons pas où nous allons. Restons confiants les uns envers les autres pour nous soutenir et passer ce cap terrible. Pour traverser au mieux cette période à durée indéterminée, le partage des expériences et des visions est nécessaire.
Fondateur d’un cabinet de conseil en stratégie international depuis vingt ans cette année, j’ai vu d’emblée deux principes actifs émerger pour la survie des entreprises. Ils sont à mener de front : gérer aujourd’hui tout en préparant demain. Car quand la vie retrouvera son cours normal, quand l’activité reprendra, il nous faudra être prêts pour ne pas nous mettre hors circuit. Il en va de la survie de nos entreprises et de notre pays. C’est bien ce qu’il se passe en Chine. La reprise est certes progressive mais certains estiment déjà que le choc pourrait être plus temporaire que durable.
Les mots paraissent simples mais ils impliquent une série de mesures à mettre en œuvre dans le bon ordre. Les projets en cours et les prévisions futures ont été suspendus assez brutalement avec la baisse subite de la demande des consommateurs et la chute des approvisionnements en provenance de Chine, ce alors que les budgets 2020 étaient validés. Certains projets ont redémarré presque immédiatement, d’autres seront plus délicats à poursuivre, beaucoup de résultats prévus seront impossibles à atteindre.
Les chefs d’entreprise, exposés au premier plan, doivent réagir rapidement pour préserver ce qu’ils ont construit et acquis, ce qu’ils envisageaient d’atteindre il y a quelques semaines encore, et pour protéger leurs salariés.
Une crise ne pas va sans inconnues. Nous naviguons parfois à vue et devons avancer sans avoir tous les paramètres. Il faut prendre des décisions dans l’incertitude. Dans ce climat instable, observons et regroupons nos informations. Les dirigeants peuvent compter sur les bases solides qu’ils ont construites, sur leurs équipes. Ils peuvent s’organiser en réseau. Ils peuvent aussi compter sur les mesures et les aides débloquées en urgence par le gouvernement qui va absorber une partie du choc. Le plan de soutien de 45 milliards d’euros est validé pour faire face à la récession.
La durée réelle de cette crise nous échappe. Elle génère de nouveaux facteurs avec lesquels nous apprenons à réfléchir et travailler. Passée la période de sidération légitime, nous nous remettons au travail. Je dirais même que la multiplicité des challenges imposés par le contexte nous oblige à rester debout. Il ne faut pas nier cette crise mais d’abord la reconnaître, puis mesurer clairement ses impacts pour pouvoir y répondre.
Chez Advancy, nous avons revu notre organisation interne et mis tous nos collaborateurs en sécurité. Nos équipes ont été mobilisées pour pouvoir poursuivre les projets en cours, et garantir la continuité des missions. Les outils digitaux permettent un travail efficace à distance. Notre éco-système reste ainsi performant pour communiquer et travailler avec le monde extérieur. Nous ne sommes pas rompus au home-office mais nous en prenons vite l’habitude. Un guide de travail élaboré à l’adresse de nos équipes nous a aidés à définir clairement les choses. Cette crise est aussi l’occasion d’optimiser ses communications, de les rendre encore plus transparentes. Nous sommes très « noir sur blanc » en ce moment. Plus les situations sont floues, plus des cadres s’imposent.
En tant que dirigeants, trouvons nos propres clefs pour surmonter le stress et rester sereins pour nos équipes. Chacun a ses recettes. Il faut pouvoir tenir le coup dans la durée, aborder les choses de façon positive. Garder et projeter de la confiance même et surtout quand on sait que la partie n’est pas gagnée. Priorisons au maximum. A tous, il nous faut une force dans l’analyse à un moment où nous perdons un peu pied. Nous sommes là aussi pour ça.
L’activité baisse et des replis drastiques sont nécessaires. Mais une activité suffisante doit être maintenue et nos actifs protégés. Cherchons du souffle. Rappelons que le contexte 2019 et ce début d’année 2020 étaient favorables. Nous avons dû faire face à 6 crises successives entre 2001 et 2013, qui ont mis en évidence les risques de destructions de valeurs à moyen terme. Nous avons surmonté ces crises et en avons tiré des enseignements. Couper immédiatement les coûts permet de sauver la rentabilité d’une année, mais nous avons aussi appris que les capacités de rebond s’avèrent souvent supérieures à ce qui a été détruit.
Beaucoup de questions se posent, et certaines ne sont pas encore résolues. Nous n’avons pas de baguette magique, mais juste la certitude que mieux nous travaillerons, meilleur nous nous en sortirons.
Par exemple, nous visons trois objectifs stratégiques dans nos travaux pour nos clients en ce moment :
- 1 - La réduction des coûts, les économies immédiates, la maximisation des marges et du cash partout où possible. C’est une évidence. Nous conseillons de couper des promotions aubaines qui ne font pas de trafic par exemple.
- 2 - La protection des « core asset » qui font l’essence de nos entreprises et de leur écosystème (clients, fournisseurs stratégiques, actionnaires). Sur qui, sur quoi, avec qui devons nous compter. Sont-ils en danger ? Pouvons-nous les favoriser ?
- 3 - La préparation à un rebond intelligent, rebond que l’on commence à observer en Chine après deux mois de crise. Ca impose de savoir que demain ne sera pas comme hier. Ca permet aussi de penser (très) différemment et d’acter des changements de modèle que nous n’aurions pas pu réaliser en 3 mois sinon.
Enfin se donner le temps. Réfléchir vite mais se donner le temps qu’il faut. Mettre en perspective l’évolution de l’épidémie et l’évolution des marchés. Pour nous-même, pour notre cabinet, nous commençons comme toujours par modéliser les marchés, leurs scénarios possibles. Nous adaptons ces modèles à chaque secteur d’ailleurs en utilisant à la fois les marchés en avance les uns sur les autres et des indicateurs de prévision avancée (la logistique notamment maritime est un bon proxy).
Sauvons ce qui peut être sauvé. Nous traversons tous la même tempête et savoir cela nous fait nous sentir moins seuls. Protégeons-nous, avec nos familles, pour endiguer l’épidémie au plus vite, protégeons nos entreprises et leurs emplois, soyons à la fois indulgent et exigeant. Soyons ensemble, pour dépasser ce moment parfois terrifiant.
Bien à vous tous,
20/03/2020