Le droit et le COVID : une épidémie juridique ?

01/03/2022 - 3 min. de lecture

Le droit et le COVID : une épidémie juridique ? - Cercle K2

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René Picon-Dupré est ancien DRH, Consultant RH et management.

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Le Covid, une épidémie sanitaire sans précédent dans le monde moderne mais serait-elle aussi à l’origine d’une épidémie juridique ?

Depuis mars 2020, le nombre de textes générés par la Covid est considérable. Votre serviteur, qui parcourt le Journal officiel de la République française (JORF) chaque matin pour des raisons liées à ses activités, s’est très vite amusé à créer un dossier "Covid", en identifiant des sous-fichiers par thèmes.

Le résultat est le suivant, à ce jour (et ce n’est sans doute pas encore fini) :

  • 115 fichiers, mais ce chiffre relève de mes choix de regrouper les textes par thèmes que j’ai choisis. Ssans être exhaustif, citons : mesures générales – activité partielle et revenus – agriculture – banque – droits d’auteurs – délais d’extension accords de branche – épandage boues – funéraire – poneys clubs et centres équestres – sport professionnel – SST et santé au travail – réunion CA et AG – titres restaurants, etc. La copie d’écran ne tient pas sur une seule page donc je vous en fais grâce.
  • 918 textes de toutes natures : lois – ordonnances – décrets – arrêtés. Et encore nous n’avons pas accès au niveau du JORF à ce que le Conseil d’État qualifierait d’infra-droit (instructions et circulaires).

En outre, et c’est sans doute, l’un des points remarquable de cette inflation juridique, certains textes ont fait l’objet de modifications fréquentes, parfois à date rapprochée, quand ce n’est pas d’un jour à l’autre.

Sur ce point, je m’intéresserai tout particulièrement[1] au Décret n° 2021-699 du 1er juin 2021 prescrivant les mesures générales nécessaires à la gestion de la sortie de crise sanitaire qui a été, depuis sa publication initiale, modifié 57 fois (source JORF), ce qui représente en moyenne une modification tous les 5 jours.

Et, parfois, quotidiennement : 8 et 9 juin 20212 ; 26 et 27 novembre 2021 ; 8, 9 et 10 décembre 2021 ; 14 et 15 janvier 2022.

Et, si l’on regarde l’objet de ces modifications, on peut constater certains éléments intéressants :

  • Le Décret n° 2021-724 du 7 juin 2021 a apporté des modifications substantielles à un décret qui datait seulement de 6 jours, aussi bien sur le fond que sur la forme :
    • Apparaissent notamment dans la version du 7 juin les dispositions relatives au passe sanitaire (pourquoi pas dans l’original ?).
    • Autre exemple, mais on pourrait les multiplier : s’agissant du transport aérien, la version du 1er juin se contente de mentionner que "l'entreprise de transport aérien assure la distribution et le recueil des fiches de traçabilité mentionnées à l'article R. 3115-67 du Code de la santé publique et vérifie qu'elles sont remplies par l'ensemble de ses passagers avant le débarquement dans les conditions prévues au II et III de ce même article". La version du 7 juin est plus précise : "l'entreprise de transport aérien assure la distribution et le recueil des fiches de traçabilité mentionnées à l'article R. 3115-67 du Code de la santé publique et vérifie qu'elles sont remplies par l'ensemble de ses passagers avant le débarquement dans les conditions prévues au II et III de ce même article. Les informations devant être renseignées dans les fiches traçabilité peuvent être recueillies par un dispositif numérique dans des conditions de sécurité adaptées à leur contenu au moyen de la plateforme européenne d'enregistrement dédiée à cet effet (www. euplf.eu). Ces données sont accessibles sans délai au directeur général de l'agence régionale de santé lorsqu'il en fait la demande et dans les mêmes conditions de sécurité". Il a fallu 6 jours pour s’apercevoir qu’il était possible de faire appel à un système numérique européen ?
       
  • Le Décret n° 2022-176 du 14 février 2022 supprime, dans les dispositions relatives aux vaccins Jansen, une date d’application, le 30 janvier 2022 : il aurait sans doute été pertinent de le faire plus tôt que le 14 février, d’autant qu’il y avait eu un décret modificatif le 14, le 15, et le 24 janvier !

Qu’en conclure ?

Loin de moi l’idée de dire que la gestion de cette crise était facile et que tout était prévisible.

On peut seulement regretter que, dans de telles circonstances, il n’y ait pas eu un effort, pour des mesures prévisibles, d’élaborer des textes moins nombreux et plus faciles à lire et à comprendre, en regroupant ce qui pouvait l’être, en fonction des dates d’application.

La trajectoire retenue, même si elle est dictée par les circonstances, donne une impression d’impréparation et d’improvisation nuisible à l'idée que l’on peut avoir de la qualité du pilotage. Et, quand, en outre, la communication est relayée par des journalistes peu au fait des subtilités des textes juridiques, on peut comprendre la perplexité de certains.

Au fait, dernière chose : quand tout cela sera fini, ce sera bien d’abroger les textes devenus inutiles.

René Picon-Dupré

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[1] Mais je pourrais multiplier les exemples.

01/03/2022

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