Mon expérience au sein de la Campagne de Biden (de la fin août au début novembre 2020)
04/12/2020 - 5 min. de lecture
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Elise Groulx Diggs est avocate, membre des Barreaux du Québec et de Paris & Consultante juridique agréée par le Barreau de New York & Associate Tenant, Doughty Street Chambers à London.
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J’ai eu la chance, et je dirais même le privilège, de m’impliquer personnellement durant la campagne présidentielle du Président élu, Joe R. Biden.
Je tiens à relater certains volets de mon expérience à mes amis et collègues du K2 car je crois que cette expérience, en période de pandémie de surcroît, est unique et vaut la peine d’être partagée. Le travail acharné de tous et de chacun a permis de remporter ces élections historiques et cette victoire doit être savourée et soulignée.
Je ne vous apprendrai rien en vous disant que les États-Unis étaient au bord du gouffre sur le plan de sa démocratie et de ses institutions que l’Administration Trump a testé sans relâche et mis à mal pendant plus de quatre ans. Personne ne savait si le système tiendrait le coup ou verserait clairement dans le fascisme. Les drapeaux rouges s’érigeaient partout et les signaux d’alarme retentissaient avec forte clameur !
Les grands journaux américains et même internationaux publiaient régulièrement des éditoriaux visant à dénoncer le langage et les actes inflammatoires du Président Trump. Il y avait aussi des lettres criant le même message et signées par des dizaines et parfois même des centaines d’ex-représentants de la sécurité nationale, des services de poursuite, des agents de la paix, de la sécurité nationale et des hauts gradés de l’Armée. D’innombrables livres sur la menace que faisait peser Trump sur la sécurité nationale et l’état de droit ont été publiés au cours des mois précédents l’élection du 3 novembre. Leurs auteurs étaient des très hauts gradés de l’Armée, des anciens Directeurs de la CIA, du FBI, ou encore des journalistes très en vue, tous invités à présenter leurs commentaires, au quotidien, aux heures de pointe des émissions d’information.
En tant qu’avocate, donc aussi auxiliaire de justice, je considère que l’un de mes premiers devoirs est celui de soutenir l’état de droit, pierre angulaire de la démocratie. Alors, j’ai répondu à l’appel sans hésiter et je me suis portée volontaire pour soutenir la campagne de Biden du mieux que je pouvais.
J’ai d’abord dû identifier les personnes au sein de mon réseau qui pouvaient m’ouvrir la porte de la campagne. Cela n’a pas été simple mais, à force de persévérance, j’y suis parvenue. Cela a pris plusieurs semaines. Ensuite, j’ai dû faire mes preuves et démontrer ma volonté de m’impliquer en passant plusieurs entrevues. Je dois dire que je sentais de la méfiance et une certaine résistance à accueillir des nouveaux venus au sein de la campagne mais, encore une fois, j’ai persisté et les portes se sont finalement ouvertes.
J’ai rejoint plusieurs comités, dont un de politiques publiques voué à la situation des femmes et aux violences dont elles sont trop souvent victimes, surtout en période de confinement.
J’ai aussi rejoint l’immense groupe de volontaires prêts à passer ses soirées au téléphone pour s’assurer de l’inscription des électeurs sur les listes électorales, pour recruter des volontaires prêts à surveiller les bureaux de scrutin et aussi des citoyens prêts à servir l’État pour assurer le bon déroulement de l’élection, en personne, malgré la pandémie.
Il a aussi fallu que nous nous armions tous de patience et de bienveillance pour parler au plus grand nombre d’électeurs et les convaincre soit de réclamer un bulletin de vote par anticipation soit d’aller voter en personne dans les États dits pourpres ou clés, la Floride, le Texas, la Pennsylvanie, le Michigan, l’Arizona et la Géorgie, pour ne nommer que ceux-là.
Tout ce travail de base s’est fait grâce à la magie de la technologie alors que des experts ont fait preuve de beaucoup de créativité en développant des outils permettant de rejoindre un très grand nombre d’électeurs par téléphone ou via nos ordinateurs. Il s’agissait d’une technologie complexe qui a nécessité des heures de formation lors de webinaires collectifs où nous étions parfois jusqu’à plus de 1500 volontaires, tous en ligne en même temps.
Je dois dire que la gentillesse et l’extrême compétence des volontaires qui nous formaient étaient impressionnantes et m’a profondément marquée et inspirée. Ils étaient littéralement bombardés de questions et toujours prêts à nous soutenir alors que plusieurs d’entre nous, dont la soussignée, se noyaient lors de l’apprentissage de ces nouveaux outils technologiques.
Ils nous repêchaient tous, immanquablement. Ces séances de formation duraient des heures et étaient très intenses. Si ce n’avait été de toute cette armée de jeunes militants du parti démocrate, je ne sais pas comment nous aurions pu faire tout le travail qu’on attendait de nous. Nous étions comme les mailles de chaînons reliés les uns aux autres avec précision et on nous faisait sentir essentiels au mouvement perpétuel de ces rouages. Si l’un d’entre nous venaient à manquer à son poste, tout l’appareil se détraquerait. Il ne fallait pas lâcher!
Il y eut ensuite ces innombrables séances / soirées téléphoniques souvent fort ingrates et même décourageantes, passées à relancer des électeurs après leur longues journée de travail. On prenait le pouls de l’électorat et il était loin d’être clair qu’on aurait le raz-de-marée democrate tant souhaité et même annoncé par certains.
Enfin, la dernière ligne droite et ces journées passées sur le terrain, à faire du porte à porte, sous la pluie ou déstabilisés par de grands vents, auprès des électeurs de la Pennsylvanie, en banlieue de Philadelphie et ce jusqu’à la dernière heure du 3 novembre 2020, avant la fermeture des bureaux de vote à 20 heures. J’ai même été interviewée par des journalistes de Radio France qui se sont retrouvés dans ces banlieues où le mari de Kamala Harris est venu nous offrir son appui et nous motiver.
Ce que je retiens de cette expérience, c’est que le travail d’équipe, soutenu et accompli sans relâche, donne des résultats et la preuve en est qu’on a gagné ces élections alors que le danger de virer dans un régime fasciste si le clan Trump les avait remportées, était bien établi, réel, clair et imminent. Nous ne pouvions pas perdre, c’était inconcevable. Les conséquences pour les États-Unis mais aussi pour le monde étaient trop graves.
Ce dont je veux me souvenir aussi, c’est l’énergie et l’engagement profond de la jeunesse américaine qui a tout donné pour que la catastrophe soit évitée. Je me sens privilégiée d’avoir pu vivre cet événement historique au milieu de ces jeunes de tous les horizons, armés d’un optimisme et d’un enthousiasme à toute épreuve. C’est eux l’avenir du pays mais aussi du monde et cela donne le courage de vouloir être à leurs côtés pour que la démocratie survive et que tous ensemble nous relancions le grand mouvement suscité par les Accords de Paris (2015) pour s’attaquer collectivement et de manière multilatérale à l’immense défi des changements climatiques car, comme l’a si justement dit le Président Macron, nous n’avons pas de Planète B.
Le fait que le Président élu Biden ait nommé John Kerry "Tsar du Climat" est de très bon augure sur le véritable engagement de cette nouvelle administration.
04/12/2020