[Groupe K2] La préparation mentale dans le football

11/04/2022 - 5 min. de lecture

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Ancien footballeur, Benjamin Nivet a joué plus de 600 matchs professionnels. Sa longévité est exceptionnelle puisqu'il a joué jusqu'à l'âge de 42 ans. Il nous parle de son rapport avec la préparation mentale. 

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As-tu eu recours à la préparation mentale durant ta carrière de footballeur professionnel ?

J’ai découvert la préparation mentale dans ma carrière à l’âge de 28 ans, malheureusement un peu tard à mon plus grand regret car je pense que, si je l’avais découverte plus tôt, ma carrière aurait pu être différente.

À l’époque, je jouais au sein du Club de Troyes et j’ai découvert la préparation mentale grâce à Jean-Marc Furlan, entraîneur de l’époque.

L’épouse de ce dernier était préparatrice mentale. Elle a donc travaillé avec nous durant plusieurs années, avec la mise en place de séances collectives mais également individuelles. À l’époque, la préparation mentale était un sujet tabou, y recourir était novateur.

 

Comment s’est matérialisée l’intervention de cette préparatrice mentale ?

Son intervention s’est faite progressivement car, au départ, Jean-Marc Furlan arrivait au Club, insérait la préparation mentale, ce qui était novateur et, par la même occasion, propulsait son épouse en qualité de préparatrice mentale dans le Club. Tout s’est donc fait par étape.

Au départ, des séances collectives ont été mises en place, l’objectif étant de faire comprendre à chacun que la préparation mentale était aussi importante que la préparation physique ou l’aspect tactique, et qu’elle faisait partie intégrante de l’entraînement. À titre d’exemple, nous avons travaillé sur la concentration, la confiance en soi et en l’autre.

Au fur et à mesure des séances, de nombreux joueurs se sont rendus compte des bienfaits de la préparation mentale. Beaucoup ont donc décidé d’y recourir à titre individuel, en plus des interventions collectives.

 

À titre individuel, comment se déroulaient les interventions et quels étaient les sujets évoqués ?

Nous parlions essentiellement de l’aspect sportif. Nous ne parlions pas de l’aspect personnel car l’objectif était l’amélioration de la performance sportive. 

Nous avons travaillé les objectifs, c’est-à-dire la fixation d’objectifs à court, moyen et long termes, ainsi que du chemin à mettre en place pour atteindre chaque objectif.

Nous avons également réalisé un important travail grâce à l’imagerie mentale. À titre d’exemple, j’avais recours à l’imagerie mentale lors du tir de pénaltys.

Avant de tirer les pénaltys, je me mettais dans ma bulle et me voyait réussir. Ces images me procuraient des pensées positives et chassaient les pensées négatives liées notamment au stress et à la peur de l’échec, ce qui est primordial pour un sportif.

J’ai également travaillé sur de la relaxation avant les matchs et cela m’a beaucoup aidé dans leur préparation. Chaque veille de chaque match, je faisais une séance de relaxation avec de l’imagerie mentale, je me préparais pour le match du lendemain et me mettais dans les meilleures conditions psychologiques.

La préparatrice mentale avait créé une vidéo de mes réussites en tant que joueur. C’était une courte vidéo de 3 minutes contenant certains de mes buts, passes et contrôles de balle réussis, et cette vidéo me permettait, avant chaque match, de me mettre des idées positives en tête et de me donner confiance avant d’entrer sur le terrain.

Grâce à la préparation mentale, que j’ai intégrée dans mon quotidien et que je considérais comme aussi importante qu’un entraînement, j’ai appris à mieux gérer mon stress et ai pris confiance en moi, deux points qui me faisaient défaut en début de carrière.

 

Tu avais 28 ans quand tu as eu recours à la préparation mentale. As-tu réellement vu une différence dans ta carrière grâce à l’introduction de cette préparation dans ton quotidien ?

Oui, j’ai senti une réelle différence. Bien sûr, ce n’est pas magique et la différence ne se fait pas ressentir du jour au lendemain car c’est un important travail sur soi-même. Il faut accepter de réaliser ce travail et y consacrer de l’énergie. Mais, pour ma part, la découverte de la préparation mentale a été un vrai bénéfice pour ma carrière.

 

Tous les joueurs du Club ont-ils été aussi réceptifs que toi à la préparation mentale ?

Je dirai que la grande majorité de l’équipe était ravie de pouvoir découvrir la préparation mentale. Cependant, le ressenti de chacun face à la préparation mentale est extrêmement différent. Certains joueurs estimaient ne pas en avoir besoin à titre individuel, d’autres, je pense, étaient réticents à l’idée de devoir se livrer, pensant que cela pourrait être perçu comme une faiblesse, voire que les propos tenus pourraient être divulgués à l’entraîneur. Il est donc primordial qu’il y ait une réelle relation de confiance entre le préparateur mental et le joueur, afin que le joueur puisse réellement se livrer et que le travail mis en place puisse être efficace et porte ses fruits.

 

Quand tu as quitté le Club de Troyes pour le Stade Malherbe de Caen, as-tu continué à recourir à la préparation mentale ?

À Caen, il n’y avait pas de préparateur mental. Cependant j’ai continué, à titre personnel, à intégrer la préparation mentale dans mon quotidien. Je faisais cette préparation mentale moi-même car, après 3 ans de préparation mentale à Troyes, je me sentais capable de continuer à utiliser les outils seul, en fonction de mes besoins.

 

As-tu connu l’intervention d’un préparateur mental dans une situation sportive complexe, notamment une menace de relégation ?

Oui, à Caen, le Club avait fait intervenir un préparateur mental, dans une situation d’urgence. Nous étions relégables et l’objectif était de réussir à se maintenir en Ligue 1. Nous avions travaillé collectivement. Cependant, cela n’avait pas été suffisant.

 

Penses-tu que la préparation mentale dans le football est aujourd’hui moins tabou qu’à ton époque ?

Je pense qu’il y a une évolution. La préparation mentale commence à se faire une place dans le football. Cependant, bien moins encore que dans les sports individuels.

Je pense qu’aujourd’hui, tout le monde a pris conscience de l’utilité de la préparation mentale même si peu de clubs ont franchi le pas de l’intégrer dans le quotidien des équipes ou des centres de formation.

 

Lors de ta formation au CDES de Limoges, avez-vous eu des interventions sur le thème de la préparation mentale ?

Oui, nous avons eu des interventions de préparateurs mentaux lors de la formation et c’est une excellente chose car, si un sportif de haut niveau peut avoir besoin de recourir à la préparation mentale, il en est de même pour un manager ou un entraîneur qui peut ressentir le besoin de bénéficier d’un tel suivi.

 

Penses-tu que tu pourrais intégrer la préparation mentale au sein d’un club si tu devais prochainement occuper des fonctions à responsabilités ?

Je pense en effet que si je devais exercer des fonctions de manager, directeur sportif ou être dans un rôle d’encadrant, je ferai le maximum pour placer la préparation mentale au cœur du projet. Cependant, j’insisterai préalablement sur l’aspect pédagogique, c’est-à-dire expliquer aux joueurs l’intérêt du recours à des professionnels de la préparation mentale tout en permettant à chacun d’être libre d’y recourir en fonction de ses envies et besoins.

D’ailleurs, à titre personnel, si je devais exercer un poste à responsabilité prochainement, je n’exclus pas le fait que je puisse avoir recours à un préparateur mental car je suis persuadé qu’un tel accompagnement ne peut être qu’un atout dans le cadre d’une carrière professionnelle. 

Benjamin Nivet

11/04/2022

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