Le Cercle K2 n'entend donner ni approbation ni improbation aux opinions émises dans les publications (écrites et vidéos) qui restent propres à leur auteur.
Bruno de Laigue est Directeur administratif & financier du Groupe Business Partners.
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"Cigares et whisky mais pas de sport… !", aurait répondu Winston Churchill, décédé à 90 ans, à un journaliste lui demandant les secrets de sa longévité… Pour d’autres, "le sport va chercher la peur pour la dominer, la fatigue pour en triompher, la difficulté pour la vaincre"[1]. Le sport est une activité se pratiquant depuis la nuit des temps….
On connaît les constructeurs des pyramides de l’ancienne Égypte. Mais ces brillantes qualités n’étaient-elles pas liées à une pratique assidue du sport ? [2] Ou encore des Crétois qui ont su donner à leurs héritiers l’amour du sport, du rythme et de la danse…[3] Difficile de savoir si le sport se pratiquait de façon informelle dans l’Antiquité ou, au contraire, permettait d’aguerrir jeunes et moins jeunes ou encore servait à flatter la plèbe (d’où l’expression célèbre du poète latin Juvénal : "panem et circenses"[4]).
Quel est le rapport entre la finance et le sport, me direz-vous ?
Chez les Égyptiens ou les Grecs, certains sports n’étaient pratiqués que par l’élite, parce que riche, comme l’équitation. Aujourd’hui encore, il est des sports "de niche" : la voile, l’automobile, le polo… D’autres sont plus populaires, car souvent moins onéreux : le football, le judo ou le running… Sans une finance saine, quel que soit le secteur, ces disciplines ne peuvent se développer et être pratiquées par tous.
C’est dire si le lien entre sport et finance est primordial !
L’activité sportive, donnant lieu à de beaux spectacles (matchs, compétitions, Jeux Olympiques, etc.), est, d’un point de vue purement économique, une prestation ponctuelle, mesurable par un résultat non prédictible. Elle est le fruit d’une production conjointe (deux équipes s’affrontant, deux joueurs de tennis se mesurant), comparable à une prestation de services mise à la disposition de tous. Le "sport-spectacle" est une alchimie d’évènements exogènes qui en fait ou non son succès à un instant donné - et c’est bien ce qui en fait sa valeur -. Ce contenu relationnel, à la fois affectif et professionnel, est un des fondements de ses ressources financières. Ce sont les fortes attentes du public qui vont générer le chiffre d’affaires, le côté déceptif n’étant connu qu’à la connaissance du résultat final et donc lorsque la prestation est terminée.
Le "sport-spectacle" est une source de financement très importante pour faire vivre une activité et en faire profiter le plus grand nombre, à travers fédérations, clubs et infrastructures.
Les recettes totales, ou chiffre d’affaires, d’un sport sont constituées de deux éléments :
- les recettes d’évènements (match de football, de rugby, de basket, etc.) ou de compétitions (Ryder Cup pour le golf, Rolland Garros pour le tennis, JO, Amerca’s Cup, etc.) donnant lieu à vente de billets et de produits dérivés ;
- les recettes dites "fatales" ne provenant pas directement de la compétition : droits télévisuels, publicité, paris en ligne, subventions étatiques car mission d’intérêt général, etc.
Elles permettent de faire face aux dépenses engagées pour et pendant la manifestation mais également à celles générées par la pratique régulière de l’activité : investissements, salaires des permanents, formation des joueurs, qu’ils soient professionnels ou amateurs… Une saine gestion et le respect d’un certain nombre de règles sont alors indispensables, tout comme au sein de n’importe quelle entreprise.
Trois sources de financement sont générées par le "sport-spectacle" : l’autofinancement, la solidarité et les aides publiques.
L’autofinancement est étroitement lié à la billetterie et à la vente de produits dérivés. La vente de billets reste le nerf de la guerre et provoque, avec la digitalisation, un effet de levier extraordinaire. Les spécialistes appellent cela l’"expérience client". Vendre un e-tickets c’est créer un premier contact avec l’acheteur permettant fidélisation et vente de produits dérivés.
La solidarité dans le milieu sportif est une force : c’est elle qui permet de créer un lien fort entre deux secteurs indissociables, le monde des professionnels et celui des amateurs. L’équilibre économique de certaines fédérations et de certains clubs peut se faire grâce à la redistribution par les ligues des recettes d’évènements via le CNDS[5]. In fine, le plus grand nombre en profite.
Les aides publiques (tant d’un point de vue local que national) sont également un moyen de financement pour les fédérations et certains clubs. Les Français sont nombreux à faire du sport et cette pratique ne cesse de progresser. 59 % de nos concitoyens pratiquent le sport régulièrement auxquels nous pouvons ajouter les 30 % de personnes ayant une pratique occasionnelle[6]. C’est dire si cette activité est importante : les autorités ne s’y trompent pas, d’autant qu’elles savent que pratiquer le sport permet de rester en bonne santé. "La condition physique est inversement corrélée au risque de forme sévère et de mortalité du Covid-19", selon Stéphane Diagana[7], une référence sportive s’il en est !
L’ensemble de ces recettes permettent de faire face aux dépenses engagées par une fédération ou un club. On pense en premier lieu au coût d’un joueur : régulièrement, la presse se fait l’écho des sommes faramineuses déboursées pour faire venir une star dans un club. Ces dépenses exceptionnelles (financées par différentes astuces) ne doivent pas faire oublier que n’importe quelle fédération ou n’importe quel club doit investir pour le plus grand nombre. D’abord, dans les infrastructures : un terrain de golf, par exemple, nécessite un matériel de qualité pour un entretien quotidien et une main-d’œuvre qualifiée. Ensuite dans la formation, aussi bien les professionnels que les amateurs. Certains sports (le tennis par exemple) nécessitent une formation de base importante. Enfin, pour permettre au plus grand nombre de pratiquer leur sport favori : plus les recettes sont élevées plus l’adhérent sera "choyé" (prix d’adhésion attractif, organisation d’évènements spécifiques, etc.).
Au-delà de toutes ces questions ne perdons pas de vue que "le sport est un des meilleurs remèdes contre les maux contemporains"[8].
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[1] Pierre de Coubertin, Fondateur du Comité International Olympique.
[2] "Les sports et les jeux de l’ancienne Égypte", Kamal Saleh Abdou.
[3] Paul Faure in "La vie quotidienne en Crète au temps de Minos", édition Hachette Littérature.
[4] "Du pain et des jeux".
[5] CNDS : Centre national pour le développement du sport.
[6] In "Le coût du sport est-il un frein à la pratique ?", Préfet de la Région d’Ile-de-France, 2014.
[7] Le Point, n° 2544, 20 mai 2021.
[8] Stéphane et Odile Diagana, Le Point n° 2544.
25/02/2022