France : l’heure du sursaut ou l’effondrement programmé

07/05/2025 - 3 min. de lecture

France : l’heure du sursaut ou l’effondrement programmé - Cercle K2

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Claude R. Jaeck est Conseiller en stratégie.

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"Nations have no permanent friends or allies, they only have permanent interests.” Lord Palmerston (1784-1865)

Depuis près d’un demi-siècle, je vis hors de France. Cette distance, loin de m’éloigner de mon pays, m’a permis de mieux en percevoir les forces et les failles. J’ai vu d’autres peuples affronter les défis de la modernité, d’autres États défendre leurs intérêts avec lucidité et courage. J’ai appris, parfois durement, que dans les grands bouleversements de la vie, nul ne vient vous secourir si vous ne savez pas compter d’abord sur vous-même. Cette expérience m’a forgé un regard sans illusion, mais non sans espérance, sur l’état de notre nation. Et c’est au nom de cet amour lucide pour la France que je me permets aujourd’hui de tirer la sonnette d’alarme.

 

L’histoire s’accélère. Chaque jour apporte son lot de bouleversements, d’alertes, de ruptures profondes. Et pourtant, tout cela était prévisible. Ce que nous vivons aujourd’hui n’est pas un accident : c’est le fruit d’années d’impréparation, de renoncements successifs, de choix stratégiques désastreux, pris par des dirigeants qui ont baissé la garde avec une naïveté sidérante au moment même où le monde redevenait dangereux.

Une défense nationale désarmée, une souveraineté bradée

Nos élites ont réduit la défense des intérêts vitaux de la France à néant. Par naïveté, par arrogance, par conformisme idéologique ou par simple incompétence, elles ont déconstruit méthodiquement les piliers de notre puissance : l’armée, l’industrie, la diplomatie, l’école, l’énergie. La souveraineté est devenue un gros mot, l’indépendance un anachronisme.

La France, jadis puissance militaire et diplomatique de premier plan, s’est laissée désarmer moralement, stratégiquement, budgétairement. Le service national a disparu. Nos arsenaux sont vides. Notre outil industriel est moribond. Nos diplomates, jadis craints et respectés, sont désormais relégués à un rôle de figurants dans les grandes négociations internationales.

Des allégeances sans retour

À force de vouloir plaire à tout le monde - à Bruxelles, à Berlin, à Washington, à Pékin - nous avons oublié de défendre nos propres intérêts. Nous avons fait allégeance à des puissances qui, elles, n’ont jamais cessé de penser en termes de rapports de force et surtout à leurs propres intérêts. Les États-Unis nous dictent leur agenda stratégique, la Chine nous pénètre économiquement sans résistance, l’Europe nous impose des règles qui affaiblissent notre modèle, pendant que l’Afrique se détourne de nous, fatiguée de notre duplicité.

Des choix économiques suicidaires

Nos choix économiques ont été dictés par le court terme et la soumission aux dogmes du libre-échange intégral. Nous avons désindustrialisé au nom de la compétitivité, privatisé nos fleurons au nom de la modernisation, bradé nos infrastructures au nom de l’efficacité. Résultat : une économie de services fragile, une dépendance accrue à des chaînes de valeur mondialisées, un chômage de masse chronique, et une jeunesse qui doute de son avenir.

Une France bientôt seule, mendiant sa survie

La crise ukrainienne a mis en lumière notre absence de vision géopolitique. L’Afrique s’émancipe de notre influence. L’Europe avance en ordre dispersé. Et pendant ce temps, la France continue de croire qu’elle peut survivre en vendant son âme morceau par morceau, à coups de traités, d’accords et de compromissions. Mais bientôt, lorsque la tempête deviendra ouragan, nous serons seuls. Seuls, et perdus, mendiants d’un secours qui ne viendra pas, ou qui aura un prix inacceptable. Car il est une constante dans l’histoire : les nations qui ne se défendent pas ellesmêmes, que personne ne respecte plus, finissent par disparaître ou se soumettre.

L’appel au sursaut

Il est encore temps. Le réveil peut encore avoir lieu. Mais il exige un sursaut - moral, politique, économique, stratégique. Il exige que les Français comprennent qu’il n’y aura pas de salut dans l’abandon, dans l’illusion technocratique, dans les injonctions venues d’ailleurs. Nous devons redevenir une nation adulte, fière, souveraine. Redonner du sens à nos institutions. Réinvestir dans notre défense, notre industrie, notre éducation. Repenser notre diplomatie dans un monde redevenu multipolaire. Et surtout : retrouver le goût de l’intérêt général, du bien commun, du service à la nation. La France ne tombera pas si elle décide de se relever. Mais il ne faut plus attendre. L’heure est venue de choisir : la soumission ou la renaissance.

Claude R. Jaeck

07/05/2025

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