Comment mettre en place une dynamique d’Intelligence Economique dans un grand groupe ?
30/09/2021 - 3 min. de lecture
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Interview de Fabien Krawczyk, Directeur Intelligence Economique du Groupe La Poste par Jérôme Bondu, Directeur du cabinet de conseil en intelligence économique Inter-Ligere.fr.
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Jérôme Bondu : Quelle est votre vision d’une activité de veille par rapport à l’intelligence économique ?
Fabien Krawczyk : Si mettre en place une veille relève de méthodologie et outils, mettre en place une dynamique d’intelligence économique et stratégique au sein d’un grand groupe est un tout autre exercice. Pour la veille, la matière première sera composée de flux RSS et autres cibles numériques de surveillance. Pour l’intelligence économique, la matière première sera la stratégie d’entreprise, sa culture et l’Humain. Ce sont deux exercices très différents qui demandent des leviers différents.
JB : Quels sont ces leviers ?
FK : Le premier levier est la création de livrables à haute valeur ajoutée. Il existe au sein du groupe La Poste de multiples livrables de veille, issus de nombreuses entités qui font de la veille. Mais deux ont toute mon attention : d’une part, nous publions tous les jours des fils de veille. D’autre part, chaque trimestre, nous publions un rapport de synthèse pour le Comité Exécutif, résumant des messages clés issus de nos observations, et qui constitue un outil pour alimenter la réflexion stratégique de l'entreprise au plus haut niveau. Ces deux instruments se complètent. Il s’agit d’irriguer les collaborateurs et le haut management en fonction de leurs besoins opérationnels et stratégiques.
JB : Les aspects communication et partage sont donc importants pour vous ?
FK : En effet, ils sont mêmes essentiels et je considère qu’ils forment le second levier.
Notre entreprise est très large : plusieurs métiers, plusieurs marchés, plusieurs géographies. Comme dans tous les grands groupes, chacun travaille avant tout pour son propre périmètre. Cependant, nous pensons qu’il n’y a pas d’intelligence économique sans intelligence collective.
Dans ce cadre, chaque trimestre, après la diffusion de notre rapport au Comex, nous faisons aussi un tour de piste de présentation des idées clés auprès de directions de l’entreprise et, dans ce cadre, nous favorisons les interactions spontanées. Nous repérons ceux qui ont un intérêt partagé pour le collectif et nous étendons ainsi notre capacité d’influence transverse.
Cela ne veut pas dire que tout doit être public en interne. La diffusion des informations est contrôlée. Mais les effets de ce partage sont énormes et participent à l'émulation collective et à la convergence des projets. Tout cela repose sur l'Humain.
JB : Quels difficultés peut-on rencontrer dans ce type de démarche ?
FK : L’appropriation n’est jamais facile ni automatique. Il faut convaincre.
Les deux premiers leviers évoqués sont complétés par un programme de webinaires ouverts en priorité à tout postier menant des activités de veille ou d’analyse stratégique, avec des intervenants de qualité. Ces webinaires sont là pour enrichir nos compétences, mais aussi pour créer du lien entre acteurs de la veille, pour nous inspirer, pour nous mobiliser. Le sentiment d'appartenance et de fierté qui s’en dégage est un facteur clé de succès majeur.
D’ailleurs, il est tout à fait symbolique que le premier intervenant à cette série de webinaires ait été Monsieur Dominique Lamoureux, Président du Comité d’éthique de la SNCF et Membre du Conseil d’administration de l’IHEDN, qui a insisté sur l’intelligence collective !
Ce programme d’interventions couvre trois thèmes : le métier de l’intelligence stratégique, les thèmes de transformation de La Poste (en lien avec notre plan stratégique) et, enfin, les techniques de surveillance et de communication des informations pertinentes, au service de la stratégie.
JB : Vous n’avez pas parlé d’outil de veille. Est-ce volontaire ?
FK : Il est clair que nous ne travaillons pas actuellement autour d’un outil : les différentes entités de veille sont encore très différentes les unes des autres et mettre en place un outil en commun, avec la gouvernance associée et les coûts d’administration, irait à l’encontre des objectifs poursuivis aujourd’hui, à savoir fournir de la valeur à l’entreprise entière grâce à l’intelligence économique et stratégique, tout en respectant les périmètres de chacun. Encore une fois, l’intelligence économique dans un grand groupe comme le nôtre rime avec intelligence collective.
30/09/2021