La cité de la peur

21/01/2022 - 8 min. de lecture

La cité de la peur - Cercle K2

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Diplômé de l’École Spéciale Militaire de Saint-Cyr, ancien Officier parachutiste à la Légion Étrangère, François Bert est Fondateur d’Edelweiss RH et de l’École du Discernement. 

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Les périodes absurdes font coexister longtemps le rire avec les larmes, jusqu’à ce que les événements finissent par dire l’intention de ceux qui les génèrent. Il y eut un film dont le nom est dans le titre et qui fit rire des générations, il y a aujourd’hui une situation française qui donne à ce film une portée prémonitoire et qui, s’il n’y a pas le sursaut attendu du bon sens, se transformera bientôt en tragédie nationale.

En prenant le train (rappelé trois fois à l’ordre par un contrôleur rouge d’indignation et revenant exprès jusqu’à moi pour deux centimètres de masque baissé dans un wagon vide), en entrant dans mon bar habituel (recadré sèchement pour avoir fait quatre mètres sans masque entre l’entrée et ma place), en écoutant la radio (découvrant à quel point le redoutable Jean-Jacques Bourdin peut être un roudoudou avec Jean Castex), en faisant un voyage de groupe (entendant une triple vaccinée obsédée du masque en extérieur revenir positive mais intimer à tous le devoir de se dénoncer comme cas contact), je ne me suis pas franchement dit ces derniers temps que j’avais la chance de vivre mais que je faisais partie d’une société qui m’avait réduit au rang d’animal soumis pour en conserver le droit.

Comment un pays comme la France, dont la gloire et le génie s’est érigé au fil des siècles au prix de risques insensés, individuels et collectifs, a-t-il pu se résoudre à devenir un tel conglomérat muet de bonnes consciences avilies ? Comment autant d’institutions, de médias, de parlementaires et de grands serviteurs de l’État ont-ils pu à ce point se résoudre à abdiquer toute forme d’intelligence, d’indépendance et de courage ?

La liberté de ton ne s’entend que — faiblement — dans l’opposition et — s’égosillant — dans les couches populaires qu’on étiquette aussitôt à défaut de débattre. Je dois l’avouer, j’ai entendu plus de choses censées sur le Covid auprès des chauffeurs VTC que sur les plateaux télés.

 

Le roi est nu !

Il faut le dire : quels que soient les artifices et l’entêtement d’un pouvoir à vouloir donner une réponse binaire à une crise complexe par le passe vaccinal, les errements de la politique gouvernementale finissent, comme la nudité du roi devant l’enfant du Conte d’Andersen échappant à l’aveuglement de la cour, par crever les yeux. Désaveu de la vaccination de masse par Omicron, qui amène une contamination de grande ampleur de la population française alors qu’elle est vaccinée à 79 %, là où les pays africains hors Afrique du Sud, pour ne citer qu’eux, très faiblement vaccinés, sont très peu contaminés (Le Monde du 14 janvier). Désaveu du passe sanitaire quand on voit comment les régions espagnoles qui ne l’ont pas mis en place résistent bien mieux à l’épidémie que celles qui l’ont imposé (Okdiario du 14 janvier). Désaveu de la politique de l’État vis-à-vis des jeunes et des enfants (risque non justifié de leur vaccination, complications respiratoires, cutanées, psychologiques innombrables avec le masque obligatoire) (rapport OMS août 2020), explosion des suicides (rapport Hôpital Robert Debré notamment). Fiasco d’une politique de détection scolaire ubuesque, désorientant unanimement élèves, parents et professeurs. Perte irréparable de nombreux médecins, soignants et serviteurs de l’État mis à pied pour avoir refusé de se faire vacciner. Dette abyssale. Fractures sociales et politiques durables d’une société française exacerbée dans ses antagonismes, etc.

 

Quelle est la menace du Covid ?

Combien de fois faudra-t-il le répéter, car les faits sont plus têtus que les crédos gouvernementaux, le Covid reste, en nombre de morts, une menace marginale pour la société (127 263 morts en tout depuis mars 2020 (Santé publique France du 17 janvier), avec un âge moyen de 82 ans en 2020, 93 % de plus de 65 ans, 5 % de moins de 55 ans (Vidal.fr), avec des chiffres contestés (grand nombre de morts à causes multiples déclarées Covid) quand le cancer fait 157 000 morts par an en 2018 (Fondation Arc).

La vraie menace, c’est la surréaction gouvernementale qui paralyse un pays entier à chaque annonce nouvelle. Quand on traite chaque incident de frontière par une mobilisation générale des Armées ("Nous sommes en guerre"), le problème n’est pas l’incident mais la mobilisation générale (et, avec elle, la peur et l’épuisement qu’elle produit). La seule politique des "cas contact" est une invention de technocrate qui ne résiste pas à l’épreuve des faits car elle est tellement ingérable qu’elle pousse soit à l’amputation opérationnelle, soit au mensonge généralisé. Et pourquoi ? Parce que, à partir du moment où, la surprise passée de la première vague, le virus a commencé d’être appréhendé, deux axes et seulement deux axes devaient concentrer l’effort collectif : les personnes à risque (co-morbidité, personnes âgées) et les lits de réanimation.

 

Personnes à risques et lits de réanimation

C’est pour les premières que la vaccination, fut-elle bancale, avait du sens, car le rapport risque / bénéfice la justifiait. D’ailleurs, la logique eût voulu que, puisque le vaccin protégeait les personnes à risque, il n’était point besoin de vacciner les autres, comme pour la grippe. Pour dire les choses en une formule, ce n’est pas en doublant la fourrure des bisons sains que l’on règlera l’attaque des loups sur les bisons vulnérables. Le gouvernement accable de complications les bisons sains, non-vulnérables aux loups comme l’immense majorité de la population au Covid, sur le prétexte de bisons vulnérables d’abord négligés et aujourd’hui instrumentalisés. Du reste, une fois les dispositifs en place et sous réserve qu’ils soient en pleine possession de leurs moyens, les personnes à risque gardent le droit de préférer une vie pleine et courte à une vie plus longue mais contrainte.

Les seconds peuvent résumer à eux seuls la crise que nous vivons : ils sont le lieu sensible des phases de poussée des contaminations et la possibilité d’absorber les cas non conformes propres à toute crise. Leur manque n’est pas nouveau : de nombreux reportages en parlaient déjà pour les grippes il y a cinq ans, dix ans, quinze ans. Non seulement la crise n’a pas amené le gouvernement à les augmenter mais elle n’a pas su le convaincre d’arrêter leur diminution, même aux pics de contamination. La coordination avec le privé a été inexistante pendant la première vague et très lente et légère ensuite.  

Regardons les choses en face : l’immense déploiement des confinements et de la vaccination, puis la culpabilisation des non-vaccinés ne procèdent, au fond, que d’une seule réalité opérationnelle, l’incapacité de l’État à monter en puissance sur ce lieu crucial (que l’augmentation des crises contemporaines exige, aussi sûrement que les militaires préparent dans le monde ou en France des forces de prépositionnement pour des crises potentielles). L’ensemble des chiffres d’alarme, paniques télévisuelles, taux d’incidence et incantations gouvernementales en faveur de soignants débordés face à la nouvelle vague s’enracinent sur cette simple réalité : les 3 à 4000 lits additionnels qui pourraient, à un coût bien moindre que tous les confinements, vagues de vaccination et tests incessants (prix financier, psychologique et moral !), permettre d’absorber les encombrements momentanés de l’hôpital. Le Covid a représenté 2 % des hospitalisations en 2020 (atih.sante.fr). Quel décalage entre cette réalité et le catastrophisme médiatique quotidien, digne des bilans des derniers bombardements pendant les guerres mondiales.

 

Un narcissisme d’État

Au centre de cette paralysie générale, il y a une très malsaine mécanique, celle de la peur. Et celle-ci procède d’une implacable logique de "bonne conscience", censée détourner les masses des fautes inévitables du gouvernement en créant des camps dans la population. Ce procédé a une racine profonde : un rapport à l’image de soi qui ne souffre pas la contrariété ni le reproche et a le besoin pathologique de projeter ailleurs les erreurs qui en sont la cause. Minorer ses fautes est une chose, que tous les gouvernements pratiquent, mais s’obstiner à ce point à les nier en désignant un coupable avec acharnement, voilà qui est extrêmement dangereux et délétère. Cette tentation entre désormais dans une forme de démesure car l’entourage du chef de l’État a été purgé de tous ceux qui pouvaient encore lui porter la contradiction, et le schéma infantile d’une réassurance permanente à être irréprochable est en roue libre. À l’heure où un grand nombre de pays constatent les limites, voire l’échec de la vaccination de masse et du passe sanitaire, l’État français accélère et s’entête. Il déclare, toute honte bue d’éternel adolescent, vouloir "emmerder" les non-vaccinés et crée sans vergogne un système discriminatoire à leur encontre.

 

La peur entraîne la peur, le courage le courage

La réalité prendra le temps qu’il faut pour s’imposer aux esprits mais, avant ce lent processus, qui se lève ? Qui s’oppose ? Qui va enfin parler au Français comme le fait un chef, en mobilisant chez chacun ce qu’il y a de plus noble, de plus combattif, de plus collectif ? Croyons-nous vraiment qu’un Churchill ait pu faire de l’Angleterre ce qu’elle fut dans la dernière guerre en lui disant : "restez chez vous" ? Les bombes pleuvaient pourtant et aléatoirement. Il n’y a pas de mauvais soldats, il n’y a que des mauvais chefs. Un peuple se hisse et dépasse ses leaders quand on sait considérer et libérer son potentiel. Si on l’animalise, car la peur est un retour aux instincts primaires, alors il se replie sur ce qu’il a de plus vil et de plus moutonnier.

La France est une nation redoutable quand elle décide d’être grande et généreuse. Cela ne se déclenche pas par des discours aux Invalides entre deux gestes barrières, mais par le courage d’un retour à une liberté d’action dans les corps intermédiaires. Il n’y a pas de grandeur sans risque, sans possibilité de lâcher la "barbichette" internationale du principe de précaution pour choisir la liberté redonnée aux majorités valides et combattives.

 

Sortir de la division par un élan partagé

La France a un besoin prioritaire d’unité. L’unité, mieux que le rassemblement, donne un point de débouché partagé. Il y a bientôt trois ans Notre-Dame brûlait, montrant à quel point le pays prenait conscience de son âme quand celle-ci menaçait de s’effondrer. La reconstruction d’un tel symbole n’est pas seulement une affaire d’architectes, elle est une convocation à une ferveur, à un élan, au besoin d’entendre célébrer à tous les niveaux ce qui fit la France grande. Quand les tentations électorales consacrent les chefs de bande et les vendeurs de rêves, verrons-nous quelqu’un capable de transformer les dominos de la peur en une force coalisée de contributeurs autonomes et convergents ?

François Bert

21/01/2022

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