Les tracances ou les liaisons dangereuses du télétravail et des vacances. A qui la faute ?

29/08/2023 - 3 min. de lecture

Les tracances ou les liaisons dangereuses du télétravail et des vacances.  A qui la faute ? - Cercle K2

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Caroline Diard est Enseignant-chercheur en Management des Ressources Humaines.

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Le néologisme « tracances » est la contraction des mots travail et vacances. Il n’est pas sans évoquer le télétravail (travail effectué à distance grâce à des outils numériques), parfois organisé loin du lieu habituel de résidence et pendant les vacances…

Depuis la crise sanitaire, on assiste à une forme d’acculturation au travail hybride qui s’est pérennisé dans beaucoup d’entreprises qui en ont d’ailleurs formalisé les modalités grâce à la signature d’accords dans le cadre d’un dialogue social renforcé. 

Il est donc désormais très tentant pour les salariés d’anticiper leur départ en vacances et d’exercer leurs missions dans un lieu paradisiaque quelques jours avant les dates officielles de leurs congés. Mais attention aux risques potentiels !

Il s’agit là en effet d’un jeu qui peu s’avérer dangereux à plusieurs niveaux tant pour les entreprises que pour les collaborateurs.

Pour les entreprises d’abord, les risques résident dans le non respect des règles de repos et du droit à la déconnexion. De plus, rappelons que dans le cadre du télétravail, il existe la présomption d’imputabilité d’accident du travail. En cas de contentieux, il ne sera pas aisé de prouver que les règles de sécurité et de prévention ont été respectées. 

Pour les collaborateurs, l’évidente porosité des frontières entre vie privée et vie professionnelle peut conduire à des conflits intrafamiliaux, à des difficultés d’organisation et à une hyperconnectivité pouvant engendrer des risques psychosociaux.

 

NB : 

Concernant le droit à congés :

Chaque année, en France, les salariés bénéficient sur 12 mois de 5 semaines, soit 25 jours ouvrés (2,083 par mois) ou 30 jours ouvrables (2,5 jours par mois) de congés payés. Le congé principal ne peut excéder 4 semaines (24 jours ouvrables) et doit être au minimum de 2 semaines en continu (12 jours ouvrables), pendant la période du 1er mai au 31 octobre (période de prise du congé principal).

Concernant le droit à la déconnexion : 

En dehors de son temps de travail habituel, le collaborateur n'est pas tenu d'être joignable par son employeur pour des motifs liés à l'exécution de son travail. 

Le droit à la déconnexion s'applique et a été instauré par la loi dite « Loi travail » du 8 août 2016, le droit à la déconnexion est en vigueur depuis le 1er janvier 2017. Il est consacré à l'article L. 2242-17 du Code du travail.

Concernant la charge de travail des salariés qui sont soumis aux dispositions suivantes du code du travail : 

  • la durée légale hebdomadaire du travail (35 heures ; article L. 3121-27) ;
  • la durée quotidienne maximale de travail effectif (10 heures sauf dérogations ou situation d’urgence ; article L. 3121-18) ;
  • la durée hebdomadaire maximale de travail (48 heures au cours d’une même semaine, et 44 heures en moyenne sur une période quelconque de 12 semaines ; articles L. 3121-20 et L. 3121-22).
     

Les tracances accentuent la porosité des temps et des lieux rendant difficile la déconnexion. Nos recherches révèlent d’ailleurs depuis 2020 que les télétravailleurs mentionnent des difficultés à déconnecter : « J’ai du mal avec les horaires et du mal à couper » Les salariés ont cependant tendance à accroitre d’eux-mêmes leur charge de travail. 

Le télétravail est donc une possible explication d’une connectivité exacerbée des salariés, mêmes pendant leurs congés. Mais si cette hyperconnectivité n’était pas liée uniquement à l’hybridation du travail. Alors, à qui la faute ?

Pas à l’employeur…

Pas au service RH…

Peut-être au collaborateur lui-même qui, à la façon d’une servitude volontaire, peine à oublier ses outils numériques. Difficile de ne pas jeter un œil discret à ses messages, même à la plage. Pourquoi ?

Pour montrer à ses proches qu’on est important, voire incontournable dans l’entreprise. Pour se sentir valorisé, prouver à son manager qu’on est impliqué. C’est le syndrome du bon élève.

Peut-être que cette hyperconnectivité est accentuée aussi par les progrès technologiques et les outils mis à disposition par les entreprise. L’usage des smartphones, des réseaux sociaux, des ordinateurs portables est un phénomène qui amplifie les opportunités de travailleur partout et à tout moment.

Il apparait désormais impossible d’oublier le travail pendant les vacances qui prennent des allures de tracances. 

Quelques conseils à destination des managers :

  • Formaliser le télétravail s’il est effectué dans un lieu et un temps inhabituel (télétravail avant ou après la période officielle de congés)
  • Rappeler les règles de déconnexion et de respect des horaires
  • Former les managers et les sensibiliser aux risques de harcèlement en cas de sollicitations excessives.
  • Bloquer les accès numérique en dehors de horaires de travail
  • Bloquer les envois de mails

 

Caroline Diard

29/08/2023

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