Le mouvement de "responsabilité sociétale des entreprises" (RSE), comme un vent d’optimisme dans un contexte de crise

20/01/2021 - 3 min. de lecture

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Chrystelle Lecoeur est Maître de conférences à l'Université de Haute Alsace (UHA) et avocate au Barreau de Paris.

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La RSE est désormais plus qu’un concept transdisciplinaire, elle vit ! Indiscutablement, elle a pris corps grâce à la multiplication, ces dernières années, des démarches volontaires (on pense notamment à l’adoption des codes et chartes éthiques) qui portent sur des domaines aussi variés que le blanchiment d’argent, l’utilisation du matériel informatique, les relations avec les sous-traitants ou encore la politique d’achat. Si pendant longtemps ces outils relevaient d’un simple "affichage éthique", aujourd’hui une véritable prise de conscience s’est faite jour. La performance des entreprises ne peut plus être réduite à la seule performance économique. La RSE s’est incarnée à travers une série de dispositions législatives qui irriguent les différentes branches du droit. Plusieurs disciplines, à l’image du droit de l’environnement ou du droit social, constituent des terrains propices à l’adoption de mesures visant à "responsabiliser les entreprises". Dans le champ social, les illustrations ne manquent pas qu’il s’agisse de mesures visant à lutter contre les discriminations, à rétablir l’égalité professionnelle ou encore à améliorer la qualité de vie au travail. Le droit des sociétés, un temps en retrait, a également profondément évolué avec l’instauration du devoir de vigilance (issu de la loi du 27 mars 2017) et plus récemment avec la loi PACTE (en date du 22 mai 2019) qui impose aux entreprises de prendre en considération "les enjeux sociaux et environnementaux" ou encore avec la possibilité de créer des "sociétés à mission". Plus que jamais cette loi invite les entreprises à s’interroger sur les impacts positifs de leurs agissements sur la société appréhendée dans son ensemble.

En période de crise sanitaire (économique et probablement sociale), l’élan insufflé par la RSE aurait pu s’émousser. Au contraire, elle agit dans une certaine mesure comme un facteur révélateur des entreprises engagées dans une démarche sincère de responsabilisation. Face à la pandémie, la solidarité des entreprises s’est exprimée de manières hétérogènes. Certaines d’entre elles ont renoncé à la mise en place du chômage partiel (Chanel, Hermès, L’Oréal, Axa, Orange), d’autres ont versé des dons financiers à des associations (la Française des Jeux pour un montant de 200.000 euros, Carrefour pour 3 millions d’euros) ou au fonds de solidarité gouvernementale (Generali pour 150 millions d’euros). Beaucoup de dons matériels ont également afflué (Décathlon, LVHM, PSA, Bouygues). Plusieurs entreprises, celles du textile notamment, ont entièrement réorganisé leur chaîne de production afin de pallier au manque de masques, alors que d’autres se sont engagées dans la production de gel hydroalcoolique (LVHM, Servier). À travers ces actions, de nombreuses entreprises ont ainsi démontré, au-delà de l’enjeu en termes d’image, leurs aptitudes à agir pour le bien commun, dans l’intérêt général. Pour autant, face à la persistance de cet épisode pandémique, la période à venir va constituer un véritable test. En dépit des difficultés rencontrées, l’avenir dira quelles sont les entreprises qui seront en mesure de maintenir le cap. À l’ère post-covid, les questions sociales, sociétales, environnementales n’apparaîtront certainement pas toutes aussi cruciales que l’exigence de rentabilité économique, mais elles ne pourront être totalement occultées. Si la tentation du repli sur soi reste grande, la RSE doit nécessairement constituer un levier favorisant l’émergence d’une "économie soutenable"[1]. Il apparaît clairement que la "crise Covid-19" a mis en évidence la profonde interdépendance de l’ensemble des acteurs et notamment des entreprises dans la "chaîne de structuration sociale"[2]. Cette interdépendance n’a pas vocation à se disloquer avec le temps. Bien au contraire, elle doit se pérenniser.

Chrystelle Lecoeur

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[1] Il faudrait pour cela que soient rapidement mises en œuvre des mesures d’ampleur et coordonnées au niveau européen, voire international. Sur la position européenne, v. P. Métais, E. Valette et G. Martin, "L’effet catalyseur du Covid-19 sur la responsabilité sociétale des entreprises", Dalloz actualité, 26 juin 2020.

[2] D. Autissier, "Changement de crise et raison d’être. Le renouveau des parties prenantes en situation de crise", Question(s) de management, 2020/3, p. 37.

20/01/2021

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