[Groupe K2] L’intelligence artificielle au service des Finances publiques
19/12/2022 - 4 min. de lecture
Le Cercle K2 n'entend donner ni approbation ni improbation aux opinions émises dans les publications (écrites et vidéos) qui restent propres à leur auteur.
Franck Duval est Administrateur des Finances publiques, Directeur adjoint du pôle gestion fiscale, DDFiP 92.
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Le numérique constitue une opportunité pour offrir un meilleur service aux usagers des différents services de la Direction générale des Finances publiques - DGFiP (impôt des particuliers et des professionnels, cadastre, publicité foncière et enregistrement, collectivités territoriales, aide aux entreprises en difficultés, etc.).
L’utilisation de l’intelligence artificielle (IA) est un progrès majeur de ces dernières années. Elle est un facteur d’amélioration du service à l’usager et de l’efficience des politiques publiques.
Le recours à l’analyse des données et à l’IA, techniques basées sur le recoupement des données, l’analyse statistique et l’apprentissage automatique permet un traitement optimal d’un grand volume de données détenues par la DGFiP. L’objectif est d’associer des compétences métiers et informatiques sur une plateforme informatique dédiée, réunissant des données décloisonnées, issues des applications de la DGFiP, d’autres administrations, de l’open data, de l’échange international d’informations entre administrations, des données des réseaux sociaux, etc.
Quelques exemples ci-dessous illustrent cette utilisation de l’analyse des données et de l’IA dans le domaine fiscal.
Dans le cadre du projet "Foncier innovant", il est possible de détecter les constructions ou aménagements non déclarés à partir des vues aériennes de l’Institut National de l’Information Géographique et Forestière (IGN). Les algorithmes permettent d’extraire des images aériennes publiques de l’IGN, les contours des immeubles bâtis ainsi que des piscines. Un traitement informatique croisé vérifie, ensuite, à partir des déclarations effectuées par les propriétaires, si les éléments détectés sur les images sont correctement imposés.
L’IA est également mise en œuvre pour détecter d’éventuels comportements frauduleux concernant les déclarations d’impôts déposées par les entreprises et les particuliers, pour aider à la programmation des contrôles fiscaux et mener des actions de contrôle plus ciblées. Ce dispositif permet de détecter à grande échelle des indices de fraudes en croisant un grand nombre de bases de données (déclarations de revenus et de résultats, fichiers des comptes bancaires, échanges automatiques d’informations entre États, réseaux sociaux, caractéristiques des entreprises contrôlées et des redressements effectués, reporting pays par pays pour les entreprises de plus de 750 M€ de CA de leur activité, effectifs, bénéfice et impôt acquitté, etc.). Elle permet aussi de modéliser des comportements frauduleux et d’affiner des méthodes de profilage. Le dispositif couvre 200 thématiques pour les risques fiscaux des professionnels et 50 pour ceux relatifs aux particuliers. La part des contrôles ciblés par l’IA est ainsi passée de 13 % en 2018 à 50 % en 2022.
La DGFiP s’est aussi dotée d’un outil Galaxie qui permet de visualiser au niveau national, d’une part, des liens existants entre des entités professionnelles (liens de participation), et entre des entités professionnelles et des personnes physiques (dirigeants, associés ou actionnaires) et, d’autre part, des éléments de contexte sur la situation patrimoniale et fiscale de ces personnes (revenu fiscal, identité du conjoint, numéro SIREN, catégorie de chiffre d’affaires, impôts et taxes auxquels sont assujettis les entreprises, etc.). Il permet de passer au crible de nombreuses informations pour lutter contre la fraude fiscale.
Les outils d’analyse de données et l’IA ont été également très utiles pendant la crise sanitaire dans le cadre de l’octroi du fonds de solidarité (FDS) aux entreprises afin d’opérer un premier tri dans les demandes reçues, à partir de critères simples, afin de traiter les demandes en très grand nombre dans des délais très courts et de détecter des fraudes manifestes. Les critères de filtrage ont notamment permis de repérer des demandes multiples ou la discordance des numéros SIREN, de distinguer ce qui relève de l’erreur humaine ou d’une intention frauduleuse.
L’IA et la Data Science permettent par exemple à la DGFiP de détecter d'éventuels comportements fiscaux frauduleux, de mieux contrôler le paiement des dépenses de l'Etat et de prévenir les difficultés financières des entreprises. Grâce au recours à l’IA, en capitalisant sur l’historique des contrôles passés et des irrégularités réellement détectées par les comptables, la DGFiP automatise la sélection des demandes de paiement les plus à risques et réduit ainsi le coût budgétaire des contrôles et le risque financier pour l’Etat.
La DGFiP a également mis en œuvre le projet "Signaux Faibles" qui repose sur un algorithme capable de cibler les fragilités des entreprises afin de mettre en place des actions d’accompagnement le plus en amont possible des difficultés financières. Ce dispositif a permis de détecter des entreprises en difficulté et d’en sélectionner certaines d’entre elles pour les contacter et leur proposer un soutien.
En conclusion, l’utilisation de IA a permis des progrès majeurs dans l’exploitation efficace des données. Il ne faut néanmoins pas perdre de vue que les productions issues de l’IA ne sont que des outils d’aides à la décision. Cela suppose donc toujours in fine une intervention humaine pour valider la conclusion qui peut être tirée d’une anomalie détectée. Elle nécessite également des mesures d’accompagnement au changement.
Enfin, il est nécessaire pour une institution publique ou privée de garder la maîtrise du fonctionnement de l’utilisation de l’IA, même en cas de recours à des prestataires privés pour certains développements informatiques.
Cette Tribune s'inscrit dans le cadre du Groupe K2 "Enjeux du Big Data" composé de :
Kevin Dumoux est Co-créateur du Cercle K2, Conseil en Stratégie, Transformations digitales et M&A - Messaoud Chibane (PhD) est Directeur du MSc Finance & Big Data, NEOMA Business School, Lauréat du Trophée K2 "Finances" 2018 - Shirine Benhenda (PhD) est Experte en Biologie moléculaire, données OMICS - Sonia Dahech est Directrice CRM, Trafic et Data omnicanal chez BUT - Franck DeCloquement est Expert en intelligence stratégique, Enseignant à l'IRIS et l'IHEDN, Spécialiste Cyber - Franck Duval est Administrateur des Finances publiques, Directeur adjoint du pôle gestion fiscale, DDFiP 92 - Yara Furlan est Trader Social Media chez Publicis Media - Jean-Baptiste Harry est HPC & AI Solution Architect & pre sales EMEA chez NEC Europe - Timothé Hervé est Risk Manager à la Banque de France - Aurélie Luttrin est Président, Eokosmo - Yann Levy est Data Analyst, Expert BI - François Marchessaux est Senior Partner, Franz Partners - Conseil en Stratégie & Management - Aurélie Sale est Coach Agile chez Renault Digital - Jun Zhou est Entrepreneur, Lecturer & Consultant in Chinese Social Media
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